La liberté de produire ses semences en danger !!!
De nouvelles réglementations sont en discussion.
PROCHAIN RÈGLEMENT EUROPÉEN SUR LES SEMENCES :
Ce qui se joue en ce moment pour la biodiversité cultivée,
l’agriculture paysanne, la souveraineté alimentaire...
Un nouveau règlement européen sur les semences est en discussion à Bruxelles, pour être adopté début 2014...
Bien sûr, l’essentiel du travail avec la Maison de la Semence est dans les jardins et les champs, pour cultiver potagères et céréales, produire des semences reproductibles, les échanger. Mais il est nécessaire aussi que nous intervenions pour modifier le “cadre légal”...
Ce qui suit ci-dessous voudrait aider celles et ceux qui veulent regarder cette question à faire le point de la situation, à partir du travail du Réseau Semences Paysannes, de Via Campesina, de la coordination européenne LLD.
(Voir aussi éventuellement à <http://www.reseauxcitoyens-st-etienne.org/article.php3?id_article=2824> ou certains points sont plus développées)
Il y a une autre chose : un désaccord important avec Kokopelli, qui demande la liberté totale du commerce sur les semences.
Problème : ça risque d’être la liberté du renard dans le poulailler, la porte ouverte à ce que les multinationales des semences industrielles puissent faire entrer en force leurs semences OGM brevetées en Europe, et liquident en quelques années les semences paysannes, notamment par contamination.
Il est important que nous nous fassions notre idée sur tout ça...
bon courage !
Roger Dubien.
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Que contient le projet de nouveau règlement européen sur les semences ?
Une 1ère difficulté est de comprendre ce qui se passe, parce que c’est extrêmement ardu et technocratique. Heureusement, le Réseau Semences Paysannes, et et à l’échelle de l’Europe La Via Campesina et la coordination européenne Libérons la Diversité ont beaucoup bossé et suivent ça de près.
Pour s’y repérer...
- Sur l’état de départ du projet de nouvelle réglementation, on peut lire un texte de mai 2013 :
“La biodiversité mise sous contrôle pour ouvrir le marché aux brevets”
<http://www.semencespaysannes.org/reglement_europeen_semences_biodiversite_mise_115-actu_178.php#date178>.
- puis une interview de Guy Kastler, fin juillet 2013, sur TV5.org : "On va favoriser la détention de toutes les semences et de toute la chaîne alimentaire par les grandes multinationales...".
(<http://www.tv5.org/cms/chaine-francophone/info/Les-dossiers-de-la-redaction/Europe/p-26013-Europe-les-multinationales-vont-elles-prendre-le-controle-des-plantes-.htm>
Guy Kastler y expliquait cependant que le projet actuel de réforme de la réglementation semble ouvrir deux portes pour les défenseurs de la biodiversité et de l’agriculture paysanne :
- Il sera possible de commercialiser des semences en petits sachets sans avoir obligation d’enregistrement au catalogue, si on est une micro-entreprise. C’est le cas de petits producteurs maraîchers...
- Les agriculteurs pourront faire des échanges informels de semences, entre agriculteurs, à partir du moment où ils ne produisent pas de semences pour le commerce.
Jusque là, il était en principe (mais pas toujours) légal d’échanger - donner ou vendre - des semences non inscrites au catalogue à condition de spécifier que c’est pour une production non destinée au commerce (usage de jardiniers amateurs). “Là, la commission européenne propose de reconnaître ces échanges de semences : soit dans le cadre de la conservation des ressources génétiques, ou bien en nature, entre personnes, si elles ne sont pas des producteurs de semences commerciales”.
- Une autre ouverture serait “la reconnaissance de ce qui est appelé le "matériel hétérogène". Ce sont des plantes sélectionnées par les paysans mais qui n’étaient pas faciles à enregistrer dans les catalogues, parce qu’elles ne sont pas considérées comme "stables" (mais) ... notre crainte se situe au niveau de ceux qui font des OGM. “
Car cette dernière ouverture a tout l’air d’un cheval de Troie pour faire rentrer légalement les OGM et autres plantes brevetées en Europe. Car il se trouve que des semences OGM obtenues par de nouvelles techniques (mutagénèse, etc...) qui ne présentent pas les caractères de DHS-(Distinction, Homogénéité, Stabilité aujourd’hui obligatoires pour être inscrites au catalogue officiel, surtout le critère de stabilité), pourraient profiter de cette “reconnaissance du matériel hétérogène” pour entrer en force en France et en Europe.
Des semences populations seraient enfin autorisées légalement. Mais, en l’état, ce sont les OGM et les brevets (avec la contamination, les procès et la ruine des paysans et jardiniers) qui profiteraient de cette porte pour entrer en grand. “Le but des multinationales est de faire rentrer leurs variétés instables dans le catalogue. Aujourd’hui, le brevet amène de nouvelles techniques comme la mutagenèse, la biologie synthétique. Le nouveau cadre juridique du matériel hétérogène leur offrirait cette possibilité de faire rentrer légalement ces nouvelles techniques en Europe.” dit Guy Kastler. Avec au bout de quelques années, comme aux USA, “la main-mise de quelques multinationales sur la totalité des semences. Avec la puissance du brevet et la contamination, mais aussi les contrôles”.
C’est pourquoi il est indispensable d’exclure les plantes OGM et brevetées du catalogue et du bénéfice de cette “ouverture”.
voilà où l’on en est pour le moment.
Une autre question est posée à cette occasion :
Liberté du commerce ou semences paysannes ?
et là-dessus il y a un désaccord avec Kokopelli, qui a fait circuler récemment un message s’en prenant au Réseau Semences Paysannes, à Via Campesina, et à la coordination européenne LLD. Et une pétition pour demander aux députés que toutes les variétés appartenant au “domaine public” (cad qui ne sont pas concernées par un COV-certificat d’obtention végétale ou un brevet) soient exclues de la législation européenne sur le commerce des semences et de toute “régulation”.
Alors que, concernant le nouveau Règlement européen sur les semences, le Réseau Semences Paysannes, LLD et Via Campesina demandent qu’il n’y ait “aucune inscription ou certification obligatoires des semences librement reproductibles qui ne sont pas protégées par un DPI" (Droit de propriété intellectuelle), mais rajoutent aussi la demande qu’il y ait “des règles simples d’identification de la variété, prenant en compte son origine et les méthodes d’obtention, et d’indication des lieux et années de multiplication des semences (...) pour informer les acheteurs”.
Cette question a été débattue au récent Forum de Bâle des associations de défense des semences paysannes. Quel est l’enjeu ?
- Pour Kokopelli, il s’agit de refuser toute régulation publique du commerce des semences.
- Pour le RSP, il s’agit d’exiger une régulation plus juste, car réclamer seulement la liberté du commerce des semences, renoncer à réguler ce commerce, ce serait ouvrir en grand les portes aux semences industrielles OGM et autres brevetées, ouvrir les portes à la contamination des semences paysannes, et à la domination quasi totale des multinationales qui les amènent dans leurs valises.
“La proposition de réglementation européenne sur le commerce des semences ne concerne en effet pas que la certification et l’enregistrement au catalogue", dit le RSP. "Elle définit aussi le matériel hétérogène enregistré sur des registres différents du catalogue, le matériel de niche qui n’est enregistré sur aucun catalogue ou registre officiel, le contrôle de la loyauté des informations commerciales revendiquées, de la qualité des semences commercialisées, l’enregistrement et le contrôle des opérateurs, la traçabilité...
Nous ne sommes évidemment pas d’accord avec la persistance de nombreuses restrictions ni avec les excès de bureaucratie et de normes imposés par ce règlement, et encore moins avec la privatisation de l’enregistrement et des contrôles. Mais nous voulons conserver un contrôle public du commerce, proportionné à la taille des opérateurs, adapté à chaque type de semences, notamment les semences biologiques, et destiné à protéger les agriculteurs et les jardiniers qui achètent des semences commerciales et les artisans semenciers qui en commercialisent contre les fraudes et les pratiques commerciales déloyales.
C’est pourquoi nous proposons de modifier ce règlement, mais en aucun cas de supprimer tout contrôle du commerce des semences, qu’elles soient du domaine public ou non (...) ”
Bref, la position du Réseau Semences Paysannes, de la coordination européenne LLD et de Via Campesina n’est pas de réclamer la liberté du commerce des semences. Parce qu’elle serait la liberté du renard dans le poulailler. Parce que s’en tenir là, ce serait aider à liquider rapidement la biodiversité cultivée et les semences paysannes.
Pour plus d’infos, voir la déclaration du CA du Réseau Semences Paysannes
<http://www.semencespaysannes.org/semences_paysannes_ou_liberte_du_commerce_115-actu_185.php>